Vénérande Robichaux

ROBICHAUX, VÉNÉRANDE, femme d’affaires, née le 1er mars 1753 à Annapolis Royal, Nouvelle-Écosse, fille de Louis Robichaux*, marchand, et de Jeanne Bourgeois ; décédée le 22 novembre 1839 à Québec et inhumée trois jours plus tard dans la chapelle Sainte-Anne de la cathédrale Notre-Dame.

Malgré ses bonnes relations avec le gouvernement britannique de la Nouvelle-Écosse, le père de Vénérande Robichaux, pas plus que ses compatriotes acadiens, ne put échapper à l’exil en 1755 [V. Charles Lawrence*]. Il obtint cependant d’être envoyé avec sa famille à Boston, où il comptait des amis parmi les marchands et les hommes d’affaires. Les Robichaux y demeurèrent trois mois puis furent transférés par le gouvernement du Massachusetts dans la localité voisine de Cambridge, où ils semblèrent vouloir se fixer, laissant passer en 1766 l’occasion de retourner en Nouvelle-Écosse avec la plupart de leurs compagnons d’exil. Toutefois, en 1775, la Révolution américaine les amena à prendre le chemin du retour et à s’établir dans la ville de Québec. Les parents de Vénérande n’étaient plus en mesure de supporter d’autres déménagements à cause de leur grand âge, et c’est elle, la cadette de la famille, qui fut leur soutien jusqu’à leur mort : son père, le 20 décembre 1780, sa mère, le 18 mars 1790. Deux de ses frères devaient également mourir peu après leur arrivée à Québec.

Un autre frère de Vénérande, Otho*, devait suivre les traces de son père et s’occuper de commerce. Comme il s’était rendu avec ses frères Frédéric et Florent dans la région de Miramichi, dans le territoire qui allait devenir le Nouveau-Brunswick, il y acheta en 1781 le commerce et la propriété de Pierre Loubert (Loubère), le mari de sa cousine. Il comptait sur Vénérande pour écouler ses produits et négocier ses achats. Otho vendait dans les marchés de Québec des huîtres, du saumon, du suif, des plumes d’oiseau, du sucre d’érable, des pelleteries, des canneberges et des boîtes d’écorce que les Micmacs avaient décorées de piquants de porc-épic ; de son côté, Vénérande lui envoyait des draps, de la lingerie, des couvertures de lit, de la farine, des rouets, des cardes et des remèdes.

Durant son séjour à Cambridge, Vénérande avait acquis la maîtrise de la langue anglaise ; son père lui avait aussi appris à lire et à écrire le français, et lui avait inculqué des connaissances générales, ainsi qu’en témoigne sa correspondance. En effet, les Robichaud de Neguac ont conservé une quinzaine de lettres qu’elle écrivit entre 1781 et 1831 à Otho Robichaux et à son fils Louis, ainsi qu’à ses parents Michel Allain et Édouard (Nede) LeBlanc, tous de cette localité.

À Québec, Vénérande demeura longtemps chez sa cousine Marie-Vénérande Pelerin, femme de l’orfèvre François Ranvoyzé*. Elle y recevait la visite de gens de Boston, amis de la famille, de même que celle d’Anglais de Miramichi et de Restigouche qui lui servaient parfois de courriers. Les missionnaires de la baie des Chaleurs, tels les abbés René-Pierre Joyer, Louis-Joseph Desjardins, dit Desplantes, et Thomas Cooke*, ne manquaient pas d’aller la voir lorsqu’ils passaient à Québec. Des Acadiens de la baie, notamment Jean-Baptiste Robichaux (fils de Jean-Baptiste Robichaux*), qui faisaient du cabotage jusqu’à Québec la visitaient aussi de façon assidue. Elle se dit heureuse, en une occasion, d’avoir reçu les Ganish et les Pominville, deux familles micmaques de Miramichi qui lui apportaient des nouvelles de cette région. Bien au courant de la vie sociale, politique et militaire de Québec, elle en entretenait régulièrement ses correspondants. Tout en conservant de bonnes relations avec les Anglais, elle était demeurée attachée à sa « chère Acadie » et se disait qu’un jour « les Anglais payer[aient] peut-être les peines qu’ils [leur avaient] causées ».

Malgré ses plaintes et ses inquiétudes, Vénérande Robichaux vivait dans une modeste aisance, que révèle l’inventaire de ses biens ; elle constitua son neveu Édouard LeBlanc, de Neguac, son légataire universel.

Donat Robichaud




Source
ANQ-Q, CE1-l, 25 nov. 1839 ; CN1-212, no 8310.— Arch. de l’évêché de Bathurst (Bathurst, N.-B.), Papiers Robichaud.— Centre d’études acadiennes, univ. de Moncton (Moncton, N.-B.), Fonds Placide Gaudet, 1.31–13A.— «Les Dénombrements de Québec » (Plessis), ANQ Rapport, 1948–1949 : 20.— Placide Gaudet, « Acadian genealogy and notes », APC Report, 1905, 2, part. iii.— Donat Robichaud, Les Robichaud : histoire et généalogie (Bathurst, [1967]).— Pierre Belliveau, French neutrals in Massachusetts [...] (Boston, 1972).
© 2000 University of Toronto/Université Laval
Source document :
Dictionnaire biographique du Canada en ligne, Bibliothèque nationale du Canada et archives nationales du Canada 
      



Dernière mise à jour : ( 24-01-2009 )