La colonisation

 

Ceux qui s'établirent à l'intérieur du pays, soit dans la région de Memramcook, au Madawaska ou ailleurs, continuèrent de vivre de la culture de la terre et de l'élevage.

Entre 1860-1970 et par la suite, la population ayant augmenté considérablement, elle se sentit à l'étroit sur ses terres. Un fort mouvement d'expansion se dessina, surtout à l'île du Prince-Édouard et au Nouveau-Brunswick. Une mystique de la colonisation, alimentée par les congrès nationaux qui possédaient leur comité de colonisation, fut entretenue pendant près d'un demi-siècle. On associait volontiers le salut de la race, la sauvegarde de la langue et celle de la foi, à la colonisation. On accentua ce lien encore davantage quand débuta une émigration intense vers les États-Unis.

L'abbé Georges-Antoine Belcourt
, curé de Rustico (I. P.-E.), établit le surnombre de ses paroissiens à Saint-Alexis de Matapédia (Québec), à Saint-Paul et Adamsville dans le comté de Kent (N.-B.). En France, Rameau de Saint-Père obtenait des fonds de ses amis, voire de l'empereur Napoléon III, pour cette oeuvre de l'abbé Belcourt. L'abbé Louis Gagnon laissa sa cure de Shippagan (N.-B.) en 1872 pour aller fonder Saint-Isidore (N.-B.) avec quelques paroissiens. L'abbé François-Marcel Richard fut un grand promoteur qui fondait ou encourageait les colonies de Rogersville, Acadieville et autres.


Cet effort de colonisation se continua jusqu'à 1930 où le futur Mgr Arthur Melanson, alors curé de Campbellton, s'occupa des colonies situées entre sa paroisse et celle de Saint-Léonard au Madawaska. Il étendit ses efforts à l'écriture de livres pour inciter le retour à la terre.

Très rapidement, cet élan colonisateur donna lieu à des initiatives originales et remarquables. Dans plusieurs endroits, on créa des cercles d'études. L'abbé Belcourt avait fondé une Banque de fermiers à Rustico (I. P.-É.) en 1864. Celle-ci émettait ses propres billets. Une autre banque, calquée sur le principe des caisses populaires, fut fondée dans la région de Saint-Louis de Kent (N.-B.). En 1883, on établit, dans cette dernière région, une Banque d'avoine de laquelle on pouvait emprunter du grain pour les semences. Elle fonctionna durant 38 ans. Des banques de grain du même genre avaient été mises sur pied vers 1869 dans toutes les paroisses acadiennes de l'île du Prince-Édouard. Avant la première Grande Guerre, on organisa, dans la région de Richibouctou, des Cercles d'oeufs, un type de coopérative de vente qui remporta un grand succès et fut imité par d'autres puisqu'en 1929, cinquante cercles du genre existaient au Nouveau-Brunswick.


Malgré ces initiatives louables, il faut bien admettre que l'agriculture n'a jamais été prospère dans les milieux acadiens après la déportation, à quelques exceptions près, à cause de la pauvreté des terres et du peu d'aide des gouvernements. Dans la plupart des colonies fondées pendant ce siècle, les colons ne dépassèrent guère le seuil de la pauvreté. D'autre part, ils se suffirent à eux-mêmes jusqu'à notre période moderne où cela semble impossible. Aussi, ces petits cultivateurs abandonnent facilement la culture de leur terre pour travailler à salaire dans les centres urbains les plus proches.






Source :
Petit manuel d'histoire d'Acadie, Les Acadiens de 1867 à 1976, Librairie Acadienne, Université de Moncton, Père Anselme Chiasson, 1976


Dernière mise à jour : ( 31-07-2008 )