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L'histoire acadienne, au bout des doigts

Michel Bastarache dit Basque Version imprimable

BASTARACHE, dit Basque, MICHEL, colon, né le 7 février 1730 à Annapolis Royal, Nouvelle-Écosse, fils de Pierre Bastarache, dit Le Basque, et de Marguerite Forest ; le 12 juin 1753, il épousa au même endroit Marguerite Gaudet, et ils eurent au moins sept enfants ; décédé le 15 janvier 1820 à Tracadie, Nouveau-Brunswick.

Au début de la dispersion des Acadiens [ V. Charles Lawrence*], Michel Bastarache, dit Basque, et ses frères, Pierre et Jean-Baptiste, allèrent s’établir dans les environs du fort Beauséjour (près de Sackville, Nouveau-Brunswick) où ils s’illustrèrent par leur bravoure. En août 1755, Michel et Pierre furent faits prisonniers ; Pierre fut incarcéré au fort Cumberland (l’ancien fort Beauséjour) tandis que Michel était emprisonné au fort Lawrence (près d’Amherst, Nouvelle-Écosse) d’où, avec 85 Acadiens, il s’échappa dans la nuit du 1er au 2 octobre en empruntant un tunnel qu’ils avaient creusé sous les murs du fort. Cependant, Bastarache fut repris peu de temps après et amené au fort Cumberland. Le 18 octobre, Michel et son frère Pierre comptaient parmi les 960 Acadiens qui, sur l’ordre de Robert Monckton*, s’embarquèrent à destination de la Caroline du Sud.

Arraché de force à sa terre natale et séparé de sa famille, Bastarache ne put s’accommoder de sa condition d’exilé. Aussi, dès le printemps de 1756, il s’enfuit à travers bois en compagnie d’une douzaine d’Acadiens, dont son frère Pierre. Ensemble, ils traversèrent à pied les colonies de la Caroline du Nord, de la Virginie, de la Pennsylvanie et de New York. Parvenus sur les bords du lac Ontario, ils tombèrent aux mains des Iroquois. Mais un trafiquant de fourrures, qui avait une assez grande influence sur les Indiens, obtint la libération des captifs en payant la rançon exigée ; il les conduisit à Québec où ils arrivèrent en septembre 1756. Ce sont probablement des exploits semblables dont rendit compte le gouverneur Vaudreuil [Rigaud*] au ministre de la Marine le 19 avril 1757 : « Il est arrivé à la Riviere St Jean 8 accadiens désertés de la Caroline. 4 de ces accadiens sont venus à Quebec je les ay interrogés. »

De Québec, Bastarache et son frère se rendirent à Panaccadie (Moncton, Nouveau-Brunswick) où quelques familles acadiennes se cachaient, la chasse à l’Acadien n’étant pas encore terminée dans cette région. Bastarache y apprit que sa femme s’était réfugiée à l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard). Malgré les risques que le voyage comportait, il se rendit dans l’île, retrouva sa femme, et ils allèrent se cacher à Miramichi (Nouveau-Brunswick), où Pierre Du Calvet* les rencontra en 1761. Moins de deux ans plus tard, cependant, le couple et quatre de leurs enfants étaient emprisonnés au fort Cumberland. C’est là que, le 24 août 1763, la famille se joignit à un groupe de quelque 70 personnes qui exprimèrent le désir de se rendre en France, mais on leur refusa cette permission parce qu’elles étaient considérées comme des sujets britanniques.

On connaît mal les allées et venues de Bastarache pour les quelques années qui suivent. En 1769, toutefois, il était au cap Maringouin, où s’étaient établis un certain nombre d’ex-prisonniers du fort Cumberland. Le 19 avril de cette année-là, il fit baptiser trois de ses enfants par l’abbé Charles-François Bailly* de Messein. Plus tard, il alla se fixer sur la rive ouest de la rivière Memramcook, à un endroit nommé aujourd’hui Cormier Cove, sur des terres appartenant à Joseph Goreham*. En 1787, probablement, Bastarache et son gendre, Joseph Saulnier, allèrent vivre à Tracadie, au nord de la baie Miramichi, où ils s’établirent sur des lots adjacents. Les deux hommes peuvent être considérés comme les fondateurs de Tracadie car, même si la famille Robert, dit Lebreton, était dans la région depuis quelques années, elle ne s’y établit de façon permanente que plus tard. Bastarache bâtit sa maison près du rivage et d’une source, puis il commença bientôt de cultiver. Après quelques années, il abandonna sa terre, sur laquelle sera construite l’église paroissiale vers 1800, pour s’installer plus loin du rivage.

En 1815, Andrew Brown*, qui amassait des matériaux pour faire l’histoire de la Nouvelle-Écosse, et plus particulièrement du peuple acadien, apprit de James Fraser*, marchand de Miramichi, l’exploit des Bastarache : « Michael OBask, son frère Peter OBask et 12 autres compagnons voyagèrent à travers bois depuis la Caroline ou, selon d’autres témoignages, depuis La Nouvelle-Orléans, jusqu’à la source du Saint-Laurent et, de là, gagnèrent en canot Cumberland pour visiter les familles de leurs épouses et leur terre natale. Les deux Bask vivent encore et habitent aux alentours de Miramichi. » Cependant, selon Placide Gaudet*, Pierre était décédé depuis le 25 mars 1796. Michel Bastarache, dit Basque, mourut à Tracadie le 15 janvier 1820, à l’âge de 89 ans ; il laissait de nombreux descendants dont les Basque du comté de Gloucester.

Corinne LaPlante


Sources:
APNB, RG 10, RS108, Pétition de Pierre Bastarache, 3 sept. 1795 ; Pétition de Charlemagne Bastarache, 6 oct. 1803.— Arch. paroissiales, Saint-Joseph et Saint-Jean-Baptiste (Tracadie, N.-B.), Reg. des baptêmes et sépultures.— CÉA, Fonds Placide Gaudet, 1.15–16, 1.38–4.— « Liste des Acadiens prisonniers au fort Beauséjour, en 1763 », Soc. hist. acadienne, Cahiers (Moncton, N.-B.), n° 7 (mars 1965) : 21–25.— « Notes from tradition and memory of the Acadian removal », Collection de documents inédits sur le Canada et l’Amérique, [H.-R. Casgrain, édit.] (3 vol., Québec, 1888–1890), 2 : 94.— « Papiers Amherst (1760–1763) concernant les Acadiens », R. S. Brun, édit., Soc. hist. acadienne, Cahiers, 3 (1968–1971) : 301.— « Quelques documents du musée du fort Beauséjour », R. [S.] Brun, édit., Soc. hist. acadienne, Cahiers, 2 (1966–1968) : 275–278.— Registre de l’abbé Charles-François Bailly, 1768 à 1773 (Caraquet), [C.-F. Bailly de Messein, compil.], S. A. White, édit. (Moncton, 1978), 30.— Arsenault, Hist. et généal. des Acadiens (1965).— Émile Lauvrière, La tragédie d’un peuple : histoire du peuple acadien de ses origines à nos jours (nouv, éd., 2 vol., Paris, [1924]).— Paul Surette, Memramkouke, Petcoudiac et la reconstruction de l’Acadie, 1763–1806 [...] (Moncton, 1981), 27.— R. S. Brun, « Histoire socio-démographique du sud-est du Nouveau-Brunswick : migrations acadiennes et seigneuries anglaises (1760–1810) », Soc. hist. acadienne, Cahiers, 3 : [58]–88.— Placide Gaudet, « Arbre généalogique de la famille Bastarache », La Voix d’Évangéline (Moncton), 29 janv. 1942 : 11 ; « Michel et Pierre Bastarache », Le Moniteur acadien (Shédiac, N.-B.), 16 avril 1889 ; « Tracadie, N.-B. », Courrier des Provinces maritimes (Bathurst, N.-B.), 17 janv. 1895 ; « Tracadie, N.-B. », L’Évangéline (Weymouth Bridge, N.-É.) ; 17 nov., 1er déc. 1892.— « L’odyssée de Pierre et Michel Bastarache, 1755–56 », Soc. hist. acadienne, Cahiers, 4 (1971–1973) : 163s.
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Source document :
Dictionnaire biographique du Canada en ligne, Bibliothèque nationale du Canada et archives nationales du Canada




Dernière mise à jour : ( 22-02-2009 )
 
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